A l’heure où la demande mondiale en aimants permanents explose, trouver une alternative à la filière d’approvisionnement classique devient un enjeu vital, stratégique et environnemental. De fait, les aimants sont partout : dans les transports (automobile, ferroviaire, aéronautique…), les moteurs industriels, la santé (IRM, implants,…), etc. La transition énergétique, avec le déploiement du véhicule électrique et de l’éolien, ne fait que renforcer les besoins. Or, la production de ces alliages magnétiques est soumise à une triple contrainte : une potentielle pénurie des ressources naturelles, l’hégémonie chinoise qui détient à elle seule la quasi-totalité des réserves en terres rares indispensables à leur fabrication, et la pression du verdissement de l’industrie, l’extraction de ces minerais étant polluante et dévastatrice pour l’environnement.
Pour y répondre, MagREEsource, fondée en 2020 après avoir été accompagnée par la SATT Linksium, propose de créer une nouvelle filière, qui réglerait du même coup le problème du recyclage des aimants. « Car à l’heure actuelle, seul 1% des aimants en fin de vie est recyclé, fait remarquer Erick Petit, fondateur et PDG de MagREEsource. Alors en Europe, on n’a pas de mine, certes, mais on a 40 ans de déchets à réutiliser. »
Faire du neuf avec du vieux
Avec Sophie Rivoirard, chercheuse à l’Institut Néel*, cet ancien industriel développe un procédé en boucle courte de réutilisation des aimants en fin de vie qu’ils brevètent en 2021, un an après la création de MagREEsource. Ce procédé présente un bilan carbone exceptionnel, puisque « à aimant chinois équivalent, on réduit de 91% les émissions de carbone au cours de la fabrication. » Il permet en outre à la start-up de garantir la souveraineté à ses clients en cas de pénurie, les déchets venant uniquement d’Europe.
Une première levée de fonds de 5 millions d’euros réalisée en 2022, a permis à la start-up de s’installer à Noyarey (38), et d’y mettre en place un démonstrateur industriel de 1200 m2 adossé à un laboratoire de caractérisation. En plus d’afficher un bilan carbone proche de la neutralité, MagREEsource a investi dans une technologie permettant de réduire de 98% la consommation d’eau nécessaire à la production des aimants. Le démonstrateur atteint déjà une capacité de production de 50 tonnes d’aimants par an, et ce n’est qu’un début. « Nous avons énormément de demandes auxquelles nous ne pouvons pas répondre, et réfléchissons actuellement à comment augmenter notre production. »
Un deuxième tour de table est d’ores et déjà en préparation, dans le but de développer des compétences et des capacités de production d’aimants spécifiques pour l’éolien, secteur en pleine expansion. D’ici à 2027, une usine de référence unique en Europe sera installée à proximité de Grenoble. Objectif : atteindre une capacité de production de 500 tonnes par an dans une première phase, puis de 1000 tonnes par an ensuite, et répondre à terme à 10% du marché européen.
* Laboratoire propre du CNRS, UGA (Grenoble INP-UGA tutelle-associée)