Développer et tester des protocoles de communication radio longues distances et basse énergie, tel est l’objectif principal du projet de nanosatellite Thingsat initié en 2019. « En réduisant la quantité d’énergie nécessaire à la transmission des informations entre l’espace et la Terre, on peut réduire la taille des panneaux solaires et des batteries embarqués sur les satellites, explique Didier Donsez, chercheur au LIG et porteur du projet. Quand on sait qu’envoyer un gramme de charge utile en orbite coûte environ 250 euros, on mesure l’impact économique d’une telle avancée ! »
Financé par plusieurs partenaires(4), le projet Thingsat permettra de tester et d’améliorer la qualité de la communication (robustesse, durabilité,…) entre un satellite et des objets connectés ou une station situés au sol. Le défi est immense : il s’agit de transmettre des données sur des distances de l’ordre de 500 km, en utilisant l’énergie d’une simple télécommande de voiture. La modulation radio LoRa, inventée à Grenoble équipe déjà des centaines de objets IoT. C’est l’une des technologies étudiées dans le contexte du New Space pour repousser les limites de transmission.
Une liaison radio optimisée en le sol et l’espace
Ce type de réseau de communication, robuste et économe en énergie, pourrait par exemple permettre de relier des capteurs placés dans des zones isolées ou extrêmes, comme sur une bouée au milieu du Pacifique mesurant les conditions environnementales ou des dispositifs de surveillance climatique en Antarctique. En transitant entre le satellite et une station terrestre en Europe, ces données pourraient être recueillies et analysées quasiment en temps réel pour suivre l'évolution des conditions météorologiques et océanographiques. « Nous évaluons la robustesse de la modulation des signaux et examinons la possibilité de nouveaux services, tels que la distribution d’une heure sécurisée aux objets au sol depuis le satellite ou la synchronisation des horloges du satellite depuis le sol, » explique Didier Donsez.
Thingsat se positionne également comme un outil de recherche accessible à d’autres laboratoires en France. Des tests de protocoles de cryptographie et de compression de messages sont par exemple en cours, en collaboration avec d’autres centres spatiaux universitaires, notamment au travers de l’AMI CMA COMETES (5).
Bientôt un deuxième lancement
En 2022, une première mission Thingsat n'avait pas été concluante. L’équipe a donc réitéré l’expérience en visant un nouveau lancement, initialement prévu pour octobre 2024 mais repoussé de quelques mois. Le prochain lancement est espéré entre mars et juin 2025. En attendant la mise en orbite, l’équipe Thingsat procède à des tests à bord de ballons stratosphériques pour reproduire les conditions de communication de plusieurs centaines de kilomètres.
En explorant des scénarios d’application concrets et en partageant sa plateforme de tests, le projet Thingsat place Grenoble à l’avant-garde de l’Internet des objets par satellite, un domaine en pleine expansion qui pourrait transformer la manière dont les objets connectés communiquent sur Terre et dans l’espace.
(1) CNRS / Inria / UGA / Grenoble INP – UGA
(2) CNRS / Université Savoie Mont-Blanc / UGA / Grenoble INP – UGA
(3) CNRS / UGA / IRD / INRAE / Meteo France
(4) Le projet bénéficie de financements des mécènes industriels de la Fondation UGA, de l'Institut des Sciences de l'Information et de leurs Interactions (INS2I), du LIG, ainsi que d'autres soutiens ponctuels tels que Persyval Lab et Carnot LSI, ce qui en fait une véritable collaboration interdisciplinaire.
(5) Sélectionné dans le cadre de l’appel à manifestations d’intérêt « Compétences et métiers d’avenir », le projet COMETES (COmpétences Et METiers pour l’ESpace) est porté par l’Université de Toulouse. Il a été co-construit en collaboration avec 25 partenaires présents dans cinq régions, avec une forte implication du Groupe ISAE, des Universités et Centres Spatiaux Universitaires, des Régions Occitanie et Nouvelle-Aquitaine et des acteurs industriels.